Cette nuit, j’ai encore fait une insomnie. A ce rythme là, je crois qu’on peut juste dire que j’ai un mode de vie mi-diurne mi-nocturne. Bref, du coup j’ai dormi pendant toute la matinée. En me réveillant, maon colloc me montre la discussion qu’il y a eu sur le groupe de la résidence. Des dizaines de messages. J’ai pas le temps mais iel me fait un résumé. Apparemment, y a des voisins qui ont entendu des bruits très tôt en haut de l’immeuble. Des embrouilles, des cris, des gens qui se battent. En tout cas, y a les condés qui sont arrivés en bas à un moment, et qui cherchait un homme armé. Au même moment, y a le gars du 4ème qui dit « heu, j’ai un boug sur mon balcon ». Bref, je vais pas vous la raconter plus en mode FAITS DIVERS que ça, parce que je suis pas BFMTV, et que c’est pas le plus important.
L’important, c’était après, les ragots de voisins. Après que le mec s’est fait embarqué, ça y va. « C’était pas quelqu’un de l’immeuble », « je dois aller déposer mon enfant à la crèche, c’est safe ? », « faut le signaler au syndic », « c’est pas normal d’héberger des gens pas stable », « on est pas en sécurité ». Bon, d’accord. Moi j’en avais un peu rien à foutre. Ouais, il se passe des trucs dans la vie des gens, c’est pas toujours marrant. Ouais, ça va sûrement atteindre votre vie, on vit en société j’crois. Les demandes de caméras ou jsp quoi, ça me saoulait.
Je sais pas ce que j’essaie d’écrire avec ce texte, mais j’ai des choses à dire j’pense. C’est moi qui ai voulu créé ce groupe quand je me suis installé dans l’immeuble. Sur Telegram, je me suis dit que c’était bien de pousser les gens à utiliser des trucs un chouïa plus sécurisé que Whatsapp (Maintenant c’est ptêtre pire Telegram). J’avais fait un super message à la main collé à côtés des entrées :
BONJOUR VOISIN.E.S
Pour créer de l’entraide entre nous (échange de bons plans, conseils, prêt d’outils, don de meubles…) et aider le travail du syndic, nous proposons de faire un canal de communication.
Il suffit d’installer l’application TELEGRAM blablabla conseiltechniqued’installation blablabla, venez à mon appart si besoin
Sauf que, on était une nouvelle résidence dans un quartier populaire. Et ça a pris du sens quand des gens ont rejoint ce groupe. Moi j’étais sur des groupes d’entraide entre anar et queeros sur Signal, je me suis dit que ça allait marcher un peu pareil. Du coup, quand les gens ont commencé à demander de venir ouvrir la porte du parking ou à trouver leur colis, j’ai essayé d’aider du mieux que je pouvais. Moi j’imaginais qu’on allait créer un gros esprit de communauté tout ça. Mais en fait, les gens parlait pas tant que ça, et n’étaient pas nombreux. SAUF QUAND, y a un SDF qui a commencé à squatter le local poubelle. Et alors là, y en a qui se sont lâché. « Gngngn, la sécurité de mes enfants » « il se drogue, c’est dangereux », « il laisse trainer des affaires ». Début d’hiver, y a des gens qui voulaient appeler les keufs pour le virer. J’ai réussi à les convaincre de pas le faire, d’aller lui parler en fait. Bref, ça s’est calmer un peu. Mais jsplus pourquoi il s’est fait dégager. La seule chose qu’à permise ce groupe, c’est que le local poubelle soit fermée à clé maintenant. Super.
Après je suis pas naïf·ve non plus. Je vois bien que le quartier il « craint ». Je me suis fait péta mon vélo au bout de 2 mois. Y a du deal, des histoires de vol de voitures. Je dirais même que y a des voitures de gangs armés qui passent régulièrement, mais apparemment ils ont le droit parce que c’est la police eux. Ah bon. Bref, c’est pas un quartier de bourges. Et ouais, quand dans un quartier pauvre, y a un groupe de gens un peu plus privilégiés économiquement, ils se font péta des trucs. Je voulais faire une histoire de la gentrification avec l’histoire de mon vélo là, mais je l’ai jamais écrit. Après ça me fait chier aussi hein ! Mon vélo bordel ! Un super VTT là, je l’avais depuis que je suis ado. Je dis pas que c’est une bonne chose de voler nos trucs. J’pense que tant qu’à voler des trucs, on devrait voir pour les magasins du centre-ville, les carrefour et conneries comme ça. Les bourgeois du Vieux-Lille même. Mais pas les voisins merde. Mais ce qui me saoule d’autant plus, c’est que la seule réponse à ça qu’on soit en mesure d’amener, nous petite bourgeoisie blanche, c’est de se plaindre des pauvres et de demander plus de mesures de sécurité. OUI DES CAMERA PARTOUT, DES CADENAS ET DES BARRIERS SVP. Fin chais pas, les gens y réfléchissent pas 2 secondes sur comment le monde y marche. Y z’ont juste peur du monde et s’en isolent.
J’en parlais avec une meuf croisée au hasard à la fac. Justement, je me plaignait de mes voisins à des gens de ma classe, et elle écoutais derrière. Elle me demande où j’habite. Elle me raconte qu’elle a grandit juste à côté, à Porte d’Arras, qu’elle a dû déménager parce que les loyers sont devenus trop cher pour sa miff. Le quartier s’est embourgeoisé, et maintenant c’est une place bleue dégueulasse avec des locals associatifs. Ptdr, merci les gauchos.
Bon, pour en finir avec cette histoire de mec sur le balcon. Au début, ça me trottait pas tant que ça dans la tête. Mais quand j’ai dû me décidé à aller faire les courses, je suis passé par le rez-de-chaussé. Et j’ai faillit pas le voir, mais sur le sol, un petit point rouge sombre. Je suis la trace jusque l’ascenseur. Y avait pleins de tâches de sang. Pas une quantité énorme hein, mais c’était là. Y avait un message qui disait que le boug du balcon était blessé. Et là, je me suis soudainement sentie vachement impuissante. Fallait pas que je m’en occupe, fallait que j’aille faire mes courses, m’occuper de ma petite vie. Genre, je sais pas si c’est compréhensible mais, si j’avais voulu nettoyer, ça aurait paru bizarre. Ce n’était pas une chose NORMALE à faire. C’était l’entreprise de nettoyage qui devait le faire. Et c’est ce qui est arrivé, 3 jours plus tard. Bordel, c’est comme ça qu’on vit ? Y a un mec qui s’est fait planté dans mon immeuble, à max 10 mètres de moi, et je savais même pas pourquoi. Je sais pas son nom, sa vie, qu’est-ce qu’il foutait là. Et jsp ce qu’il va devenir, s’il est blessé fortement ou quoi. Jsp vous, mais à ce moment-là, ça m’a paru totalement irréaliste, inconcevable. Genre j’habite dans un immeuble où je connais personne, des gens avec qui j’ai sûrement pas grand-chose en commun. Et mes relations avec eux, c’est d’évacuer tout imprévu que la routine capitaliste nous impose. Je ne gère pas mes interactions avec eux, si y a un problème, je suis censé appeler les keufs. Je ne gère pas les lieux dans lesquels je vis, des gens font mon ménage. Je ne gère pas grand-chose dans ce qui est censé être MA maison, là ou j’existe, mon seul lien c’est avec l’agence immobilière. Je gère pas ce que j’apprends en cours. Je gère rien de mon existence en fait, du monde. Je pourrais caner, y a presque personne qui verrait la différence. C’est horrible.
Voilà, pas vraiment d’analyse politique là, je râle pour râler, et pour pas oublier. Parce que la solution en vrai, c’est déjà ce que je fais. Essayer de trouver une communauté, queer et libertaire. Vivre en commun, aux cantines, dans les loisirs. Mais c’est pas assez. L’endroit où j’habite n’est pas un endroit ou je VIS. C’est juste un endroit où je suis. Je suis atterrée de voir que c’est la norme que je suis censé respecter. C’est pas une vie ça, c’est pas une société ; C’est être un rouage dans un empire marchand inhumain. J’ai besoin de plus. Nous avons besoin de plus.
25/11/2024
Destro